Claude Roy

Claude Roy - Rencontres buissonnièresL’enfant qui a la tête en l’air

Si on se détourne, il s’envole.
Il faudrait une main de fer
Pour le retenir à l’école.
L’enfant qui a la tête en l’air
Ne le quittez jamais des yeux :
Car dès qu’il n’a plus rien à faire
Il caracole dans les cieux.
Il donne beaucoup de soucis
A ses parents et à ses maîtres :
On le croit là, il est ici,
N’apparaît que pour disparaître.
Comme on a des presse-papiers
Il nous faudrait un presse – enfant
Pour retenir par les deux pieds
L’enfant si léger que volant.

L’enfant qui battait la campagne

Vous me copierez deux cents fois le verbe :
Je n’écoute pas. Je bats la campagne.

Je bats la campagne, tu bats la campagne,
Il bat la campagne à coups de bâton.

La campagne ? Pourquoi la battre ?
Elle n’a jamais rien fait.

C’est ma seule amie, la campagne.
Je baye aux corneilles, je cours la campagne.

Il ne faut jamais battre la campagne :
On pourrait casser un nid et ses œufs.

On pourrait briser un iris, une herbe,
On pourrait fêler le cristal de l’eau.

Je n’écouterai pas la leçon.
Je ne battrai pas la campagne.

L’excès des petits noms d’amitié

« Mon petit chat
mon gros minet,
Mon doux mouton, mon chatounet »
Disait la mère à son bébé
Dans l’excès des diminutifs.
Il ne faut pas trop s’étonner :
Enfant d’un amour excessif
Le petit se mit à miauler
Et la maman à ronronner.