Il est d’étranges soirs

Rencontres buissonnières

d’Albert Samain (Au jardin de l’infante, Paris, Editions de l’Art, 1936 [1893])

partagé avec nous par Paul (Nancy)

Il est d’étranges soirs, où les fleurs ont une âme,
Où dans l’air énervé flotte du repentir,
Où sur la vague lente et lourde d’un soupir
Le cœur le plus secret aux lèvres vient mourir.
Il est d’étranges soirs, où les fleurs ont une âme,
Et, ces soirs-là, je vais tendre comme une femme.

Il est de clairs matins, de roses se coiffant,
Où l’âme a des gaietés d’eaux vives dans les roches,
Où le cœur est un ciel de Pâques plein de cloches,
Où la chair est sans tache et l’esprit sans reproches.
Il est de clairs matins, de roses se coiffant,
Ces matins-là, je vais joyeux comme un enfant.

Il est de mornes jours, où las de se connaître,
Le cœur, vieux de mille ans, s’assied sur son butin,
Où le plus cher passé semble un décor déteint
Où s’agite un minable et vague cabotin.
Il est de mornes jours las du poids de connaître,
Et, ces jours-là, je vais courbé comme un ancêtre.

Il est des nuits de doute, où l’angoisse vous tord,
Où l’âme, au bout de la spirale descendue,
Pâle et sur l’infini terrible suspendue,
Sent le vent de l’abîme, et recule éperdue !
Il est des nuits de doute, où l’angoisse vous tord,
Et, ces nuits-là, je suis dans l’ombre comme un mort.

Albert Samain

Catherine S.

Témoignages - Rencontres buissonnières

Quelle magnifique journée que celle vécue à Citeaux ce samedi 16 novembre 2019, placée sous l’égide de ce très grand homme et poète que fut Claude Nougaro !

Sensation profonde et délicieuse de découvrir vraiment, à travers les témoignages fournis, le florilège de textes de chansons choisis, dévoilé au-delà de l’absence par le miracle de l’enregistrement ou réinterprétés par des voix féminines actuelles, un vrai troubadour – teinté de catharisme – issu du Moyen-Âge, nous livrant, avec profusion et amour, des tonnes de paroles d’or ciselées et nourrissantes.

Quel plus bel hommage offert au public que la présence de proches comme Hélène, sa femme, ou Sophie, la fille de l’ami cher Henri Guérin, pour nous faire pénétrer dans l’antre du travail alchimique de Claude : oeuvrer patiemment dans le creuset de la Solitude et de l’Ecriture, avec l’oeil vigilant de l’Esprit en éveil, en transformant la Matière fournie par la Réalité avec ses expériences belles ou douloureuses, pour finalement faire jaillir l’or à partir de l’inspiration, du souffle de Vie et de la Création. Savoir alors, dans la phase finale, communier avec le public par une voix chaude et profonde et par une musique choisie, en faisant jaillir des étincelles capables de réchauffer les coeurs, de réveiller les âmes et d’enchanter les corps présents dans la magie du spectacle.

Moi, amoureuse de la littérature, du joyau de la Poésie, j’ai été touchée au coeur par la grâce de ce grand poète que fut Claude, cette belle personne qui a su si bien transcender sa vie par l’écriture. Merci à toi Claude. Par toi, une fois encore, le Verbe s’est fait Chair !

Isabelle Vajra

Ô Cîteaux
« L’amour sourcier »

Isabelle Vajra - Rencontres buissonnières
Isabelle Vajra

Je suis revenue de Cîteaux le lendemain de la Rencontre buissonnière autour de Claude Nougaro et Henri Guérin, mais cette Rencontre chemine encore en moi…

Le mot « Rencontre » a été fort bien choisi par celle qui a créé et qui  fait vivre ces Rencontres buissonnières à l’Abbaye de Cîteaux : Francine Ohet.

Ont donné également vie à cette Rencontre intitulée « L’amour sourcier » : 

  • Jacques Bonnadier, qui avait enregistré vingt émissions consacrées à Claude Nougaro sous ce titre en 1994, 
  • Sophie Guérin Gasc, la fille du maître-verrier Henri Guérin,
  • Hélène Nougaro, l’épouse de Claude Nougaro, la « douce et forte Hélène », comme l’écrit Henri Guérin dans l’une de ses lettres à Claude Nougaro, enfin
  • Raymond Lernould, qui avait composé la Bande Originale audio et vidéo de cette Rencontre à Cîteaux,
  • le Trio Tapatou, qui ponctuait cette Rencontre en interprétant des chansons de Claude Nougaro.

Ce que je retiens de cette Rencontre, c’est qu’elle m’invite à écouter nombre de chansons de Claude Nougaro sur un autre plan, à en découvrir la quintessence. 

Si je devais personnellement retenir trois chansons, ce seraient les chansons : Assez  (… « Déclouez votre Jésus-Christ  Assez ! Suffit »…),  L’Enfant-Phare  et  L’espérance en l’homme, tant l’espérance est liée à la spiritualité.

Le thème de cette Rencontre buissonnière axée sur la spiritualité chez Claude Nougaro appelait aussitôt celui de la foi chez Henri Guérin. Cette rencontre m’invite également à découvrir l’oeuvre d’Henri Guérin, oeuvre qui nous a été présentée à Cîteaux par Sophie Guérin Gasc à travers les représentations des vitraux conçus par son père, maître-verrier, mais encore ses poèmes et ses gouaches notamment.

Enfin, véritable Rencontre humaine que celle de Claude Nougaro et Henri Guérin se révélant au fil de leur correspondance lue par Sophie Guérin Gasc, Hélène Nougaro et Jacques Bonnadier. 

Cette Rencontre était également ponctuée d’anecdotes, respirations pleines de légèreté comme ce témoignage enregistré de Liette Nougaro, la maman de Claude, racontant la première communion de son fils.

J’ai eu l’honneur et la joie de chanter Claude Nougaro pour clore cette Rencontre et ce sont les cloches de l’Abbaye de Cîteaux qui, s’entremêlant aux notes de mon piano « Sur un prélude de Bach », m’ont invitée à m’arrêter sur ce point d’orgue céleste.

Mes gratitudes vont à :
Francine Ohet, Hélène Nougaro, Sophie Guérin Gasc, Jacques Bonnadier, Raymond Lernould, le Trio Tapatou,
et dans le monde sacré à …Dom Olivier, le Père Abbé de Cîteaux, Frère Bertrand à la technique et Frère Bernard à l’organisation, à Cîteaux l’Abbaye, elle-même, Ô Citeaux …

Merveilleux lieu de Rencontres buissonnières, spirituelles et humaines tout à la fois. Tout à la Foi … serais-je tentée de dire, sous l’influence du jeu des mots de Claude Nougaro et d’Henri Guérin.

         La rencontre n’aurait pas été complète sans la présence d’Annick Steta, qui a partagé avec nous son article « L’hommage de Notre-Dame de Paris à Claude Nougaro », paru dans « La Revue des deux mondes ».

         Merci à tous ceux qui ont fait le chemin vers Cîteaux pour cette Rencontre Nougaro Guérin et à tous ceux qui, n’ayant pu faire ce chemin, l’ont fait en pensée et par le cœur.

Isabelle Vajra
Le 30 novembre 2019

Odette

Témoignages - Rencontres buissonnières

J’ai quelque gêne à parler de cette journée Nougaro-Guérin à Cîteaux, n’ayant malheureusement pu y assister qu’un temps trop court, mais puisque Francine me l’a demandé … Car je lui ai dit que pour moi, c’était vraiment une découverte ! Je n’ai jamais été une fan de Nougaro, que j’entendais parfois distraitement à la radio.

A Cîteaux, j’ai découvert la profonde beauté de sa spiritualité, de son attachement à une valeur telle que l’amitié, à laquelle il fut fidèle, de ses talents littéraires, tant dans cette correspondance magnifique qu’il échangea avec Henri  Guérin, où ils se montraient dignes l’un de l’autre, que dans ses chants. « L’île Hélène », entre autres, quelle révélation !

Et merci pour le petit livret qui nous a été donné, si riche d’enseignement sur ces deux personnalités exceptionnelles.

Et j’ai pensé : Combien de fois, dans la vie, croisons-nous avec indifférence des êtres de grande valeur, sur lesquels nous portons parfois des jugements hâtifs et faux,  faute d’avoir su prendre le temps de les écouter plus attentivement ?

Merci aux Rencontres buissonnières , où Francine accomplit un grand travail, de qualité, et merci au Père abbé de Cîteaux, si accueillant à des sujets, qui, à première vue, à première vue seulement, n’y avaient pas leur place, étant si attentif à tous ceux qui cherchent, si respectueux de leur chemin, si ouvert à la richesse qu’ils portent en eux.

Odette LEGE

Dom Olivier Quenardel

Sept fois sept

Dans le Prologue de la Règle, saint Benoît énonce clairement son propos. Il veut instituer une « école au service du Seigneur ». Le monastère doit donc être compris comme une « école ». Aux oreilles de qui connaît l’Evangile, le mot résonne aussitôt. Jésus n’invite-t-il pas ceux qui l’écoutent à se mettre à son « école » ? Comment alors ne pas trouver chez saint Benoît l’écho de l’invitation du seul Maître qui peut se dire « doux et humble de coeur » ?(1)

Le moine sera donc un écolier. Du commencement à la fin, il sera un écolier. Novice ou abbé, cuisinier ou portier, malade ou bien portant, quelles que soient son origine et son ancienneté, il restera jusqu’au bout un écolier. C’est-à-dire qu’il ne cessera jamais d’apprendre son métier, il ne pourra jamais considérer que sa formation est terminée. Au contraire, plus il avance dans la vie monastique, plus il mesure son ignorance et chante en vérité :

A la mesure sans mesure
De ton immensité,
Tu nous manques, Seigneur,
Dans le tréfonds de notre cœur
Ta place reste marquée
Comme un grand vide, une blessure.(2)

Le monastère : une « école » ?…Oui ! Mais pourquoi ? …Pour apprendre à servir le Seigneur. Tout y est organisé dans ce but : servir le Seigneur. « Servir », voilà un autre mot qui tinte immédiatement aux oreilles d’un ami de l’Evangile. « Le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude. »(3)

En regardant Jésus, le seul Maître à qui rien ne doit être préféré, le moine n’aura d’autre besogne que d’apprendre de lui l’art d’être serviteur. Pour cela, saint Benoît lui remet une sacoche d’outils aussi variés que performants:instruments pour bien agir, instruments pour bien servir. Plus le moine en fait usage, plus son cœur se dilate. Une infinie douceur d’amour le saisit. Pour lui, aimer et servir deviennent synonymes. Il ne peut plus séparer le service du Seigneur et celui des hommes…même s’il se sent toujours un « apprenti » à l’école de l’amour. Proche de tous, uni à tous, il devient peu à peu un serviteur bon et fidèle qui, un jour, s’entendra dire : « Entre dans la joie de ton Seigneur ! »(4)

(1)Mt 11,29
(2)Hymne de la CFC(Commission francophone cistercienne)
(3)Mt 20,28
(4)Mt 25, 21

Roland Machet

Rolland Machet - Rencontres buissonnieresJ’ai eu beaucoup de plaisir à échanger avec Anne. J’ai été touché des réactions positives à mes sculptures et de voir aussi que les cartes avec des photos de mes sculptures et des phrases de la Bible ont été appréciées.

J’ai été étonné par la jeunesse et la maturité de Pierre Adrian, sa recherche de ce qui peut donner plus de sens à la vie.

Ayant passé 6 ans en coopération en Algérie, je suis très sensible à tout ce qui touche ce pays. J’avais déjà lu le livre de Fadila Semaï, mais j’ai été encore plus ému par son implication, montrant comment la rencontre entre un musulman Mohamed et un chrétien séminariste Christian a pu être déterminante pour la vocation du prieur de Tibhirine. Puissent des relations de cette profondeur se multiplier entre chrétiens et musulmans.

Roland Machet

Quelques mots sur Anne Le Maître et Roland Machet

Anne Le Maître - Rencontres buissonnières 2018Les fidèles de nos Rencontres buissonnières connaissent bien Anne Le Maître qui est intervenue à Cîteaux en mai 2014 (Au commencement était l’enfance) et en mai 2016 (Chemins vers la beauté). En automne 2013, dans le cadre d’une autre association, elle y avait exposé plusieurs de ses œuvres tout un week-end.
Aquarelle Saint-Pere - Anne le Maitre - Rencontres buissonnieresCe qu’elle aime dans la vie : marcher, vagabonder, voyager, contempler, se mettre à l’écoute de la sagesse de l’herbe et partager avec son entourage sa passion de l’art et de la littérature. Ses aquarelles sont empreintes d’une poésie délicate, ainsi que ses écrits et son site Internet que nous vous invitons à découvrir ou redécouvrir : Bleu de Prusse


Rolland Machet - Rencontres buissonnieresRoland Machet connaît bien Cîteaux où, dans le cadre de la communauté Vie chrétienne, il a participé en 2016 à un week-end de l’atelier art, chaque participant apportant une œuvre ou un texte qu’il explique et que commentent les autres participants.
Sculpture oiseau - Roland Machet - Rencontres buissonnieresCette année, il a accepté d’être l’invité de Rencontres buissonnières et nous en sommes heureux car le style dépouillé de ses sculptures, essentiellement à base de bois et de pierre, s’accorde parfaitement avec la simplicité cistercienne. A ses créations tout en mouvements et courbes, on a envie d’appliquer cette phrase d’Eugène Guillevic : « Chaque nœud du bois est plein de chants d’oiseaux. »
Vous pouvez consulter son site : http://roland-machet.fr/